Dessine-moi un mouton
Mon dessin du jour s'adresse aux Martiens : le profil d'un chat de 100 km de long, dont les pattes seraient des péninsules, la tête un cap et la queue une route toute en lacets qui grimpe au sommet (800 m d'altitude) d'une île : Shodoshima, la plus méditerranéenne de l'archipel nippon qui dessine sur les cartes le profil d'un chien sans queue, d'une chèvre ou d'un mouton. Et parce que j'avais en tête cette petite voix - la voix de l'enfant que je suis resté au cycliste et au géographe - qui me disait "dessine-moi un mouton" - j'ai décidé de faire le tour de celle qu'on surnomme l'île aux olives car depuis 100 ans son microclimat exceptionnel permet d'y cultiver des oliviers. Le sud-ouest de l'île est en effet très méditerranéen avec des oliviers un peu partout dont certains ont été transplantés d'Espagne ou de Grèce, mais le nord-est est beaucoup plus âpre et sauvage et en pédalant sur les falaises là-haut dans les bourrasques de vent qui font tourbillonner les feuilles mortes on pense un peu à la Bretagne. Mais l'image s'efface dès qu'on attaque la route très pentue qui permet d'accéder au sommet battu des vent, le Kankakei, on se retrouve en montagne, on remet les gants, les couvre-chausse et le buff et on écoute les macaques qui piaillent dans les sous-bois et se posent parfois sur la route telles des pierres dans leur fourrure grise. En descendant la route raide comme une rampe on prie pour qu'ils n'aient pas l'idée de galoper dans vos roues quand soudain dans un virage on tombe sur toute une colonie de ces macaques japonais, les primates les plus septentrionaux de la planète avec nous. Les bébés s'aggrippent aux mamans, leur caracolent sur le dos, tout une famille s'épouille mutuellement, de jeunes mâles se bagarrent, un vieillard vous regarde et attend la photo. Et si en fait tu avais dessiné un singe en hiver, ton autoportrait ?