57 morts et disparus, 109 blessés, des dizaines de milliers de personnes évacuées ou privées d'électricité : le séisme de magnitude 7,6 suivi de 200 répliques qui ont perduré encore la nuit dernière dans la péninsule de Noto est l'une des plus graves catastrophes survenues au Japon depuis Fukushima. C'est toujours un peu délicat de raconter ses impressions d'un pays lorsque celui-ci est frappé par une telle tragédie. Hier matin nous avions prévu initialement de nous rendre sur la mer du Japon que je n'ai toujours pas vue - chaque fois que j'y projette un voyage, il pleut ou il neige, cette fois-ci c'est la terre qui a tremblé, la mer qui s'est soulevée, comme si ce "Japon de l'envers" était un peu maudit. Les alertes au tsunami nous ont invités à modifier le programme et comme des millions de Japonais en ces jours de fête endeuillés, nous nous sommes rendus au temple. Les plus vieux et les plus grands du Japon se situent à Nara et dans les environs, qui est un peu au Japon ce qu'Angkor Vat est au Cambodge. Aller à Nara un 2 janvier, c'est comme aller à Lourdes un 15 août. Avec la différence peut-être que tout le pays, des plus jeunes aux plus vieux, fait le pèlerinage vers l'antique capitale. Dans ce pays où les taux de natalité sont au plus bas, c'est un prodige de voir autant d'enfants, et c'est comme si on me les avait cachés depuis mon arrivée. Ce qui les attire ici, ce sont les 1200 daims classés trésors nationaux du parc de Nara, 1200 daims qu'on peut nourrir, caresser, photographier, 1200 daims qui vivent parmi les temples et vous regardent de leurs grands yeux tendres ou vous poursuivent en quête de friandise. Nara, c'est aussi le plus vieux bâtiment en bois du monde, le Horyu-ji, et le plus grand : le Daibutsu-den du Todai-ji, qui abrite un énorme bouddha de bronze flanqué de 2 majestueux boddhisatvas dorés. Pour qui aime l'architecture et la statuaire bouddhique, la région de Nara, origine du Japon et du bouddhisme dans l'archipel, est un must-see : nulle part dans l'archipel on se sent reconnecté à toute l'Asie, retrouvant ici ces visages énigmatiques, ces figures antiques, apsaras, kannons, bodhisattvas qui nous regardent parfois depuis 1400 ans.