Et si à la rentrée vous ne lisiez pas que des romans ?
Il paraît que les Français publient trop de livres. Il paraît qu'il n'y aurait plus assez de lecteurs pour les lire et que nous vivrons bientôt dans une sorte de dystopie où il y aurait davantage d'auteurs que de lecteurs, au point qu'il faudrait se demander s'il ne vaudrait pas mieux inverser les rôles : les lecteurs écriraient dans leur tête des livres imaginaires, les écrivains la boucleraient et liraient (car il y en aura toujours pour vous affirmer qu'ils ne lisent pas, qu'ils n'en ont pas le temps, qu'ils le passent à écrire, que ce qu'ils écrivent est si précieux qu'ils ne peuvent pas s'éparpiller, et patati et patata) - ils liraient, les écrivains, les non-dits des autres, ou alors ils écouteraient, tout simplement, ils tendraient l'oreille hors de leur cerveau, ça leur ferait du bien de sentir ce qui se dit, ce qui se passe, à l'extérieur.
On connaît les raisons de cette inflation : l'éditeur est un homard, qui féconde tout ce qui bouge et laisse les petits se débattre dans la nuit abyssale des rentrées littéraires (oui, il y en a deux par ans, deux périodes de frai, en septembre et en janvier) ; il se dit que des centaines de menus fretins seront dévorés par les gros requins, mais qu'il en restera bien deux ou trois, vaillants jusu'au bout, qui sauront passer entre les mailles des filets et les fanons des baleines pour engraisser et devenir assez vorace au point de lui ramener un gros morceau, du genre Femina Feminis ou Renaudot Renaudix, et donc pas mal de fric parce que sans cela l'éditeur finira l'année en cale sèche.
L'année dernière j'avais pris le départ en avril, hors période de frai ; c'est la raison qui m'avait valu de ne pas être dévoré tout cru par mes congénères ; mais après avoir erré pendant des mois dans la nuit abyssale, autant dire que j'étais bien essoufflé, en novembre, à l'heure de la curée. Cette année, je ne prends pas le départ, je suis disqualifié d'avance. La rentrée n'est pas faite pour les essais car, quand les Français retournent au boulot, il leur faut des romans, pour oublier.
Mea culpa, je publie cette année deux livres en décalé. Pire, ce ne sont pas même pas des romans, mea culpa bis repetita. Mais ce ne sont peut-être pas complètement des essais. Je laisserai aux critiques le soin de les définir.
Trêve de digression, donc, et voici l'annonce :
Le premier livre est un essai qui interroge les liens entre peinture, littérature et géographie de l'âge classique à l'ère du numérique.
Le second livre est un récit qui, sous la forme d'un journal de bord, relate mon séjour de deux mois à Jérusalem, "interroge les cartes, met au jour les frontières, les limites, les murs qui sillonnent aussi bien la géographie d’une région aux contours flous que celle, intime, de ses habitants" pour citer mon éditeur.
Mais aussi, à Jérusalem : Kaïs Bacri, Abdelfattah Abousrour, Anne Richard & Marlène Stuczynsky, Vincent Lemire, Florence Heymann, Damien Simonneau, Raphaël Chetrite, Khalil Toufakji, Tal Nitzan, Marie-Armelle Beaulieu & Hélène Morlet, Alice Raulo, Yoni Darmon, Julien Chiappone-Lucchesi, Augustin Favereau, Hervé Magro. J’ai une pensée toute particulière pour les jeunes du camp d’Aïda, à Bethléem, qui m’ont laissé recueillir leurs témoignages, et les élèves du Lycée français de Jérusalem, dont les récits m’ont bouleversé et qui trouveront dans ces pages, je l’espère, le témoignage de ma gratitude et de mon admiration. À Beyrouth, je remercie du fond du coeur tous ceux qui m’ont accueilli et fait découvrir leur ville : Chaïda Tuéni, Salma Kojok, Tania Hadji-Thomas, Michel Choueiri, Georgia Makhlouf, Patrice Paoli. Enfin, ce livre n’aurait jamais vu le jour sans ceux qui m’ont lu et soutenu à mon retour : Marie de Quatrebarbes, John Jefferson Selve, Oliver Rohe, Régis Debray.
- le dimanche 4/10 aux Journées Julien Gracq à St-Florent-le-Vieil
- le mardi 6/10 au café littéraire St-Sulpice à Paris 6e
- le mercredi 7/10 à 19:30 à la librairie Charybde à Paris 12e