le négatif des falaises 1
Le dessin sera l'envers de l'écriture. Pour ne plus passer son temps à noircir des pages et des pages de carnets, assis comme un con à un bureau, derrière un écran, alors qu'il fait si beau dehors. Blanchir plutôt, aller vers la lumière. Je sais que la falaise n'est pas que blancheur mais c'est ce blanc qui m'attire, c'est lui que je veux capter dans les rets du dessin, graver sur la page qui sera noire désormais, comme un négatif du roman, comme un négatif de la fameuse page blanche de l'écrivain, prétendue métaphore de son angoisse, alors qu'elle n'est qu'un fantasme. Blanchir, au lieu de noircir, oui, pour en finir avec la machine à bricoler du roman qui me tue pas à pas, m'asphyxie, me prive de jour, de souffle et d'imagination. Je sais que la falaise est un autre écran, un autre mur auquel je me cogne en pure perte, et que je ne leur échapperai plus, aux murs, aux écrans, aux frontières qui m'éloignent de la vie, de la lumière. Mais ces grandes perches à la peau tigrée me fascinent et sous mon ciel cauchois, où les éclaircies sont rares, je n'ai pas d'autre compagne...
Varengeville, Gorge des Moûtiers, craie blanche sur papier noir. 30x40 cm.